Peter Mutharika reprend la présidence du Malawi après la défaite de Lazarus Chakwera

L’élection présidentielle du 16 septembre au Malawi s’est conclue par un tournant politique majeur. Le président sortant, Lazarus Chakwera, âgé de 70 ans, a reconnu sa défaite et félicité son rival, l’ancien chef de l’État Peter Mutharika. Ce geste a été salué comme une preuve de maturité démocratique dans un pays souvent éprouvé par les crises politiques et institutionnelles.

Chakwera avait accédé au pouvoir en 2020, après l’annulation historique des résultats contestés de 2019. Il avait alors remporté une victoire nette avec près de 59 % des voix, marquant la première alternance issue d’une élection annulée sur le continent. Mais cinq ans plus tard, il n’a pas réussi à convaincre les électeurs de lui accorder un nouveau mandat.

Le scrutin a été dominé par les préoccupations économiques. L’inflation dépasse aujourd’hui 33 %, tandis que la majorité de la population vit avec moins de 2,15 dollars par jour. Le coût du maïs et des engrais – produits essentiels pour un pays agricole – a explosé, accentuant la précarité des ménages. Pénuries, manque de devises et flambée des prix rythment le quotidien. Beaucoup de Malawites reprochent au gouvernement sortant son indécision, sa mauvaise gestion et une corruption persistante.

Âgé de 85 ans, Peter Mutharika n’est pas une figure nouvelle pour le Malawi. Professeur de droit constitutionnel, frère cadet de l’ancien président Bingu wa Mutharika, il avait dirigé le pays de 2014 à 2020. Son premier mandat avait été marqué par un certain volontarisme économique, mais aussi par de vives critiques liées à la corruption et à l’autoritarisme. Sa défaite en 2020, face à Lazarus Chakwera, avait été perçue comme la fin de son influence politique. Son retour est donc une surprise et une revanche personnelle, confirmant son enracinement au sein du parti démocratique progressiste.

Son retour au pouvoir place Mutharika face à des défis colossaux. L’économie malawite, très dépendante de l’agriculture, souffre d’une vulnérabilité chronique aux chocs climatiques et aux fluctuations mondiales des prix des denrées. Le nouveau président devra restaurer la confiance des investisseurs, relancer la production agricole et améliorer l’accès aux devises. Sur le plan social, il devra aussi répondre aux attentes d’une jeunesse nombreuse, frappée par le chômage massif. Sur le plan diplomatique, le Malawi devrait poursuivre son ancrage dans la Communauté de développement de l’Afrique australe et maintenir des relations pragmatiques avec ses bailleurs de fonds traditionnels : Banque mondiale, FMI, Union européenne et États-Unis. Reste à voir si Mutharika adoptera une posture d’ouverture ou s’il renouera avec les pratiques jugées opaques de son premier mandat.

Malgré cette amère défaite, Lazarus Chakwera a réaffirmé son attachement à un transfert pacifique du pouvoir, un point crucial dans une région où la démocratie est souvent fragile. L’officialisation de la victoire de Peter Mutharika ouvre une nouvelle page de l’histoire du Malawi. Mais cette alternance ne sera durable et bénéfique que si le nouveau chef de l’État parvient à relever le défi de la gouvernance et à répondre aux urgences économiques et sociales.

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