Mali–Russie : une alliance radioactive au cœur du Sahel

Le président malien Assimi Goïta est en visite officielle en Russie depuis le 22 juin, à l’invitation de Vladimir Poutine. Ce déplacement marque une nouvelle étape dans l’alliance stratégique entre Bamako et Moscou, au moment où le Mali cherche à affirmer sa souveraineté et à s’émanciper des anciennes tutelles occidentales. Au Kremlin, Goïta a signé plusieurs accords majeurs, scellant une coopération économique et sécuritaire d’envergure.

Au centre de cette nouvelle dynamique figure un projet de centrale nucléaire civile que la Russie s’engage à construire sur le sol malien. L’accord, conclu avec la société Rosatom, prévoit également un appui technique, la formation de cadres maliens et le développement d’un programme énergétique complet. Pour un pays enclavé, confronté à des défis énergétiques immenses, le nucléaire apparaît comme une promesse d’indépendance à long terme – même si sa concrétisation nécessitera des décennies.

Mais ce partenariat ne se limite pas à l’atome. Bamako et Moscou ont également signé un accord portant sur la création d’une commission intergouvernementale pour renforcer les échanges commerciaux, scientifiques et technologiques. Sur le plan sécuritaire, la coopération militaire est consolidée, notamment dans la lutte contre le terrorisme et le crime organisé. Cette dimension intervient dans un contexte de retrait des forces françaises et onusiennes, remplacées par des éléments russes du “African Corps”, héritiers de Wagner.

Sur le terrain économique, la Russie soutient activement la construction d’une raffinerie d’or à Sénou, près de Bamako, inaugurée à la mi-juin. Cette infrastructure stratégique permettra au Mali, premier producteur d’or en Afrique de l’Ouest, de transformer localement sa production, jusqu’ici majoritairement exportée brute. À travers cette initiative, le gouvernement malien entend mieux maîtriser ses ressources et accroître ses revenus dans un contexte de sanctions et d’isolement régional.

Ce rapprochement russo-malien s’inscrit dans une logique géopolitique plus large. Pour Moscou, il s’agit de renforcer son ancrage sur le continent africain, alors que son influence est contestée sur d’autres fronts. Pour Bamako, l’objectif est clair : diversifier ses partenaires, rompre avec la dépendance aux institutions occidentales, et affirmer une nouvelle vision de sa souveraineté nationale. Le choix du nucléaire, autant symbolique que stratégique, envoie un message fort.

Dans un contexte marqué par de profondes tensions diplomatiques avec la France et une défiance croissante à l’égard de l’Algérie, le Mali cherche à redéfinir ses alliances. En s’ouvrant à de nouveaux partenaires comme la Russie, Bamako tente de construire un avenir plus autonome, fondé sur une coopération plus équilibrée. Si le chemin reste semé d’embûches, cette stratégie traduit une volonté claire de rupture et de réinvention dans un monde aux équilibres mouvants.

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