La Tanzanie ferme ses petites entreprises aux étrangers : une mesure nationaliste aux répercussions régionales

La Tanzanie a pris une décision audacieuse et controversée en interdisant aux étrangers la propriété et l’exploitation de plusieurs types de petites entreprises sur son territoire. La nouvelle réglementation, entrée en vigueur cette semaine, cible 15 secteurs considérés comme stratégiques pour l’économie populaire tanzanienne, dont les transferts d’argent mobile, le guidage touristique, l’exploitation minière artisanale, l’achat de récoltes aux agriculteurs, les salons de beauté, les boutiques de souvenirs, ainsi que la création de stations de radio et de télévision.

Pour justifier cette mesure, le ministre du Commerce Selemani Jafo a dénoncé la « prise d’assaut » du secteur informel par des ressortissants étrangers, dans des activités que les citoyens tanzaniens « peuvent et doivent maîtriser ». Selon lui, il s’agit d’un acte de souveraineté économique visant à « redonner aux Tanzaniens les moyens de leur propre prospérité » et à favoriser l’emploi local dans des filières jusque-là accessibles à des opérateurs étrangers souvent perçus comme dominateurs.

Cette initiative a été accueillie avec enthousiasme par une partie de la population, portée par un sentiment nationaliste croissant et une méfiance latente à l’égard de la concurrence étrangère, notamment chinoise. Dans de nombreux marchés urbains, cette décision est vue comme une reprise de contrôle sur une économie de proximité que beaucoup jugeaient en déclin au profit d’intérêts extérieurs. Elle s’inscrit aussi dans une volonté plus large des autorités de réguler un secteur informel devenu tentaculaire.

Mais au-delà des frontières, la mesure suscite de vives critiques, en particulier du Kenya voisin, dont de nombreux ressortissants opèrent dans les secteurs désormais interdits. Nairobi a exprimé ses inquiétudes face à une décision jugée discriminatoire, et appelle la Tanzanie à respecter les engagements pris dans le cadre de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC). Le Kenya redoute qu’un tel précédent n’entraîne une série de mesures similaires dans la région, sapant les fondements mêmes de l’intégration économique est-africaine. Un bras de fer diplomatique semble désormais se profiler, entre souveraineté nationale et logique communautaire.

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