Vingt ans de prison ferme et une amende de cent millions de francs CFA : telle est la lourde sentence prononcée par la Cour criminelle spécialisée de Libreville contre l’ancienne Première dame du Gabon, Sylvia Bongo Ondimba, et son fils aîné, Noureddine Bongo Valentin. Le verdict, rendu après deux jours de procès, marque une nouvelle étape dans la vaste opération judiciaire lancée par les autorités de transition depuis le renversement du président Ali Bongo Ondimba en août 2023.
Jugés par défaut, les deux accusés ont été reconnus coupables d’une série de crimes économiques et financiers incluant détournement de fonds publics, recel, usurpation de fonctions, corruption active, blanchiment d’argent et association de malfaiteurs. Ils sont accusés d’avoir participé à un système présumé de prédation financière au sommet de l’État, soupçonné d’avoir siphonné des ressources publiques durant les dernières années du régime Bongo.
Dix autres proches du cercle présidentiel, parmi lesquels d’anciens conseillers et collaborateurs influents, continuent de comparaître devant la même juridiction. Tous font face aux mêmes chefs d’inculpation, témoignant de l’ampleur du dossier et de la volonté affichée par les nouvelles autorités gabonaises de « tourner la page du système Bongo » en exposant publiquement les mécanismes de corruption présumés.
Depuis Londres, où ils résident, Sylvia Bongo et son fils n’ont pas répondu à la convocation de la justice gabonaise. Leurs avocats dénoncent un procès politique et contestent la régularité de la procédure, estimant que « les conditions d’un procès équitable n’étaient pas réunies ». Les autorités de Libreville rejettent ces accusations, assurant mener une lutte exemplaire contre l’impunité et les détournements de fonds publics.
Ce jugement, symbole de la rupture proclamée par le régime de transition, pose néanmoins des questions sur l’indépendance de la justice dans un contexte politique encore instable. Pour les nouvelles autorités, il s’agit d’une démonstration de fermeté contre la corruption. Pour les proches des condamnés, c’est une justice instrumentalisée. Au Gabon, l’affaire continue de susciter débats et passions, tandis que le pays s’interroge sur la capacité du pouvoir actuel à réformer durablement un système longtemps verrouillé.