Éthiopie : un méga-accord entre Dangote et Addis-Abeba, avec OCP en toile de fond

Le milliardaire nigérian Aliko Dangote s’apprête à signer à la mi-juillet 2025 un accord historique de 3 milliards de dollars avec le gouvernement éthiopien pour la construction d’une usine d’engrais. L’annonce, faite par le Premier ministre Abiy Ahmed, marque une nouvelle étape dans la stratégie industrielle du pays, qui ambitionne de réduire sa dépendance aux importations et de renforcer sa souveraineté alimentaire. Située dans la région somalienne, non loin du corridor stratégique vers Djibouti, l’usine produira principalement de l’urée, avec des perspectives d’exportation vers l’Afrique de l’Est et le Moyen-Orient.

Ce projet n’est pas seulement une opération industrielle ; il constitue un levier politique et économique majeur pour un pays qui sort lentement d’un cycle de conflit. En attirant un acteur aussi puissant que le groupe Dangote, Addis-Abeba entend rassurer les marchés, stimuler l’emploi local et repositionner l’Éthiopie comme hub de transformation agricole. L’usine devrait générer des milliers d’emplois directs et indirects, tout en dynamisant des filières locales encore peu industrialisées.

Mais ce n’est pas le seul projet d’envergure en cours dans le secteur. Le géant marocain OCP, déjà actif dans le pays à travers sa filiale OCP Africa, développe depuis 2016 une unité de production de fertilisants phosphatés à Dire Dawa. Prévue pour atteindre 3,8 millions de tonnes annuelles à terme, cette usine complète parfaitement celle de Dangote, axée sur les engrais azotés. Ensemble, ces deux initiatives pourraient faire de l’Éthiopie un acteur majeur de l’industrie des engrais en Afrique, capable d’assembler les composants clés — azote, phosphate, potassium — sur son propre sol.

Cette dynamique sud-sud témoigne d’une volonté de reprendre le contrôle de chaînes de valeur agricoles jusque-là dominées par des puissances extérieures. Entre le Nigeria de Dangote et le Maroc d’OCP, l’Éthiopie devient le terrain d’une coopération industrielle panafricaine ambitieuse. Elle envoie aussi un signal clair aux autres pays africains : la souveraineté alimentaire passe par l’investissement massif dans l’agro-industrie, l’infrastructure et les partenariats régionaux.

Si les défis logistiques, financiers et politiques restent considérables, ce double pari industriel pourrait bien transformer durablement le secteur agricole éthiopien. Dans un continent à forte croissance démographique, où la sécurité alimentaire est un enjeu central, ce type d’alliance entre puissances africaines offre une voie concrète vers l’autonomie et la résilience économique.

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