En Algérie, le pouvoir s’épuise à…s’auto-dévorer

L’arrestation du général Nacer Eljenn, figure influente de l’appareil sécuritaire algérien, vient s’ajouter à la longue liste des purges qui agitent le sommet de l’État. Ce n’est plus un fait isolé. C’est un mode de gouvernance. En Algérie, le pouvoir ne se transmet pas : il se remplace dans la douleur. Les anciens protégés d’hier deviennent les parias d’aujourd’hui. Et chaque nouvelle arrestation obéit moins à la justice qu’à la logique implacable des règlements de comptes internes. Le système ne se réforme pas : il se recycle en se dévorant lui-même.

Depuis la chute de Bouteflika, les Algériens assistent à un théâtre de purges sans fin. Généraux, ministres, oligarques… tous tombent un à un. Mais derrière la façade judiciaire, le scénario est toujours le même : un clan élimine l’autre. Le général Eljenn n’est pas une exception. Il paie moins pour des fautes avérées que pour une proximité avec les réseaux d’hier. Il n’a pas été arrêté pour corruption ou abus de pouvoir – des pratiques généralisées – mais parce qu’il ne fait plus partie du cercle. Il est devenu encombrant. Il devient donc coupable.

Cette guerre des clans est devenue la colonne vertébrale du système algérien. Elle transforme l’armée, censée garantir la stabilité, en cœur battant de l’instabilité. Car en Algérie, l’État est tout sauf civil. Le pouvoir militaro-politique fonctionne par allégeance, par chantage, et par peur. Les équilibres sont fragiles, mouvants, imprévisibles. Et lorsque des généraux tombent, ce n’est pas pour faire place à la démocratie, mais pour permettre à d’autres généraux de s’asseoir à leur place.

Ce cycle infernal empêche toute vision d’avenir. Pendant que le pouvoir se livre à une guerre d’ombres, le pays s’enfonce. L’économie reste prisonnière d’un modèle rentier, la jeunesse fuit, les libertés s’érodent, et la défiance est totale. À force de préférer la loyauté à la compétence, la fidélité au mérite, le régime s’est vidé de toute substance. L’Algérie ne gouverne plus : elle survit dans une logique clanique, digne des plus grandes mafias politiques, où la trahison est la seule stratégie durable.

Tant que le pouvoir algérien continuera à remplir ses prisons de ses propres hommes, tant que la survie du régime primera sur celle de la nation, rien ne changera. Ce pays, riche de ressources et de talents, reste otage d’un système incapable d’autocritique. La véritable rupture ne viendra pas d’un procès de plus, mais d’un clan de moins — et surtout, d’un système enfin mis à nu.

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