La Conférence internationale sur les crimes du colonialisme, organisée à Alger le week-end dernier, se voulait un grand rendez-vous historique dédié à la justice et à la reconnaissance des torts du passé. Elle aurait pu être un espace sérieux de réflexion sur les ravages du colonialisme, un débat nécessaire sur les responsabilités et la réparation historique. Mais la manière dont Alger s’est emparée de cet événement illustre surtout une constante : transformer chaque tribune internationale en écran de fumée, destiné à masquer ses propres déconvenues diplomatiques, notamment son isolement croissant sur la question du Sahara marocain.
Depuis des années, la diplomatie algérienne recycle les mêmes éléments de langage, les mêmes postures mémorielles, et la même rhétorique victimisante pour éviter d’affronter une réalité de plus en plus évidente : l’ONU a acté, à travers ses résolutions successives, que la solution politique crédible, réaliste et durable passe par l’autonomie sous souveraineté marocaine. L’Algérie le sait, mais persiste à s’enfermer dans un combat qu’elle a déjà perdu sur les plans diplomatique, régional et international. Face à cette impasse, elle tente de réactiver la question coloniale pour redonner une légitimité à un discours qui n’en a plus dans les enceintes multilatérales.
Derrière les grands appels à la justice mémorielle et à la restitution des biens spoliés par la France, l’objectif est clair : occuper le terrain médiatique pour éviter d’aborder celui où Alger accumule les revers. Les milliards déboursés depuis un demi-siècle pour entretenir le conflit du Sahara, financer des réseaux d’influence et maintenir artificiellement en vie un projet séparatiste sans ancrage populaire représentent un coût énorme pour un pays qui peine à diversifier son économie, moderniser ses infrastructures et répondre aux aspirations de sa jeunesse. Cette fuite en avant mémorielle sert à détourner l’attention d’une politique étrangère prisonnière d’un dossier qui entrave sa propre évolution.
Le paradoxe est saisissant : tandis que le Maroc poursuit son développement économique, investit massivement dans les régions sahariennes, renforce ses alliances africaines et devient un acteur clé dans les chaînes de valeur mondiales, Alger organise des conférences pour revisiter le passé plutôt que pour bâtir l’avenir. Elle se replie sur une lecture figée de l’histoire pour compenser son incapacité à accompagner les dynamiques du continent et la transformation géopolitique du Maghreb. L’instrumentalisation du colonialisme n’effacera ni l’échec diplomatique autour du Sahara ni la dissonance entre les ambitions proclamées et les résultats réels. L’histoire avance, avec ou sans Alger.