Une nouvelle dynamique culturelle traverse le continent : après des années dominées par le streaming et la télévision, les cinémas africains reprennent vie avec vigueur. En 2025, le Nigeria, l’Afrique du Sud et le Sénégal ont rénové ou inauguré près de 200 nouvelles salles, un record depuis trente ans. Ce retour du grand écran reflète une volonté stratégique : structurer une industrie cinématographique rentable, intégrée et tournée vers l’international.
À Lagos, l’ouverture simultanée de 120 écrans multiplexes dans six villes secondaires (Abeokuta, Ibadan, Enugu, Kaduna, Warri et Benin City) a transformé des zones jusque-là dépourvues d’infrastructures culturelles. Selon la Cinema Exhibitors Association of Nigeria, le box-office 2025 atteint 2,1 milliards de dollars, en croissance de 12 %.
À Johannesburg, la chaîne CineAfrika investit massivement dans des complexes premium intégrant VR, projections laser et salles IMAX. En parallèle, les écoles de cinéma sud-africaines forment plus de 3 000 techniciens par an, une première sur le continent.
À Dakar, la start-up “CinemaKara” révolutionne l’accès au cinéma en développant une plateforme de réservation numérique et en organisant des projections mobiles dans les zones rurales. L’objectif : reconnecter un public longtemps éloigné des salles.
Ce renouveau est aussi alimenté par la montée en gamme de la production. Nollywood, autrefois cantonné aux budgets modestes, investit désormais dans des productions de 2 à 5 millions $, parfois co-financées par Netflix ou Amazon. L’industrie attire talents, scénaristes et techniciens internationaux, et nourrit une économie créative plus large : mode, musique, gaming, produits dérivés.
Cependant, la piraterie (estimée à 50 % des recettes perdues), la faiblesse de la distribution transfrontalière, l’insuffisance des réseaux de cinéma rural et les coûts élevés de maintenance menacent cette renaissance.
L’enjeu est clair : faire du cinéma africain un secteur économique structuré, exportable et créateur d’emplois qualifiés.
L’Afrique saura-t-elle transformer cette renaissance cinématographique en véritable industrie culturelle intégrée, ou le secteur retombera-t-il dans la fragmentation, freinant sa montée en puissance internationale ?