À Bamako, les files de voitures serpentent à perte de vue devant les stations-service. Certaines pompes sont déjà fermées, d’autres rationnent les rares litres encore disponibles. Depuis plusieurs jours, la capitale malienne vit au rythme d’une pénurie d’essence qui paralyse les transports, fait grimper les prix et alimente la colère des habitants.
L’origine de la crise se trouve à l’ouest du pays, dans les régions de Kayes et de Nioro du Sahel, placées sous blocus par les combattants du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), affilié à Al-Qaïda. Les convois de carburant, pris pour cibles, n’arrivent plus à ravitailler la capitale. Selon un rapport récent de l’Association malienne des importateurs de pétrole, plus d’une centaine de camions-citernes ont été incendiés ou détruits ces dernières semaines par les groupes armés, dans une stratégie assumée d’« asphyxie économique » de Bamako.
Sur le bord d’une route poussiéreuse, Bakary Coulibaly regarde son kiosque vide. Il revendait de l’essence au détail. Aujourd’hui, il n’a plus rien à vendre. « Tous ces gens viennent chercher du carburant, mais il n’y en a plus nulle part. Même les stations sont à sec », confie-t-il, résigné.
Face à la gravité de la situation, l’armée malienne a commencé à escorter les convois de camions sur les principaux axes reliant Bamako aux ports sénégalais et ivoiriens. Le gouvernement affirme avoir mobilisé ses services pour contrôler les stocks et surveiller les dépôts. Le Directeur général adjoint du Commerce, de la Consommation et de la Concurrence promet un retour progressif à la normale « dans les prochains jours ».
Mais dans les rues de Bamako, la promesse peine à convaincre. Les taxis restent à l’arrêt, les motos se font rares, et le marché noir explose. Dans la chaleur étouffante d’octobre, c’est toute une ville qui retient son souffle — à court d’essence, mais surtout d’espoir