À Conakry, la capitale guinéenne, la campagne pour le référendum constitutionnel s’est achevée jeudi dans une ambiance festive et très encadrée. Prières, concerts et lectures de Coran ont rythmé les derniers jours, tandis que les rues et les bâtiments étaient recouverts d’affiches à l’effigie du colonel Mamadi Doumbouya, chef de la junte arrivé au pouvoir en 2021 après avoir renversé le président Alpha Condé. Dimanche, près de 6,7 millions d’électeurs sont appelés à se prononcer par “oui” ou “non” sur un texte qui prolongerait le mandat présidentiel de cinq à sept ans et ouvrirait la voie à une candidature éventuelle de Doumbouya, bien qu’il n’ait pas encore annoncé ses intentions.
Pour ses partisans, ce référendum est une étape clé vers la stabilité et la transition civile. Certains saluent un projet qui renforcerait le rôle du Parlement avec la création d’un Sénat, censé améliorer l’équilibre institutionnel. Dans les quartiers populaires de Conakry, des habitants affirment que le colonel incarne l’espoir d’un renouveau, à l’image de Kadiatou Diaby, une commerçante qui dit voter pour la première fois avec conviction. “Je lui fais confiance. Je vais voter, et mes enfants aussi”, témoigne-t-elle.
Mais cette mobilisation cache l’absence totale d’opposition dans la campagne. Plusieurs partis ont été dissous l’an dernier, les trois principales formations ont été suspendues, et les critiques dénoncent une “mascarade électorale”. Les organisations de défense des droits humains pointent du doigt la répression croissante : médias indépendants réduits au silence, sites d’information suspendus, journalistes arrêtés. Human Rights Watch évoque des disparitions forcées d’opposants, tandis que Reporters sans frontières alerte sur la coupure répétée des réseaux sociaux et des radios privées.
Dans ce contexte, les appels au boycott se multiplient. L’opposant en exil Cellou Dalein Diallo accuse le référendum de servir à “légitimer un coup d’État”, là où ses soutiens y voient un moyen de tourner la page de l’instabilité. Entre promesse de transition et soupçons de dérive autoritaire, le scrutin apparaît moins comme une consultation pluraliste que comme un plébiscite autour d’un homme et de son régime. Reste à savoir si la participation dépassera le seuil requis de 50 %, condition indispensable pour que la nouvelle constitution entre en vigueur.