À Bamako, un festival de marionnettes défie la crise et expose les fragilités du pouvoir

Dans un quartier résidentiel de Bamako, des marionnettes géantes traversent les rues sous les regards émerveillés des habitants, contraignant motos et voitures à ralentir pour laisser passer ce spectacle inattendu. Le festival “Rendez-Vous Chez Nous”, porté par le groupe Nama et désormais à sa neuvième édition, rassemble plus de 200 marionnettes et entend recréer un espace de cohésion dans une capitale éprouvée. Derrière la fête, l’événement renvoie à une réalité plus sombre : un Mali soumis à des contraintes sécuritaires et économiques qui ont profondément bouleversé le quotidien des Bamakois.

Depuis septembre, la ville subit les effets d’un blocus du carburant imposé par le groupe armé JNIM, révélateur des limites de l’autorité étatique et de la persistance des vulnérabilités sécuritaires. Début octobre, Bamako a presque cessé de fonctionner : pénuries massives, écoles fermées, activités paralysées. Pour Yacouba Magassouba, directeur de Nama, cette situation n’a fait que renforcer la nécessité de maintenir le festival. Il rappelle que les marionnettes, héritage ancestral du pays, ont toujours été un instrument de transmission et de résistance culturelle. Leur présence au cœur de la ville prend alors une dimension politique : témoigner de l’existence d’une société civile qui continue de créer malgré l’affaiblissement du cadre sécuritaire.

Autour des déambulations, le festival propose danse, théâtre et concerts, attirant familles et jeunes à la recherche d’un moment de légèreté. Pour des artistes comme Adama Traoré, ces formes contemporaines permettent de réinventer un patrimoine tout en offrant une échappatoire bienvenue. Mais pour de nombreux habitants, cette bouffée d’air artistique revêt aussi une signification plus profonde : c’est un rappel que, malgré la crise du carburant, l’insécurité et la pression des groupes armés, Bamako reste capable de se rassembler. Dans un contexte où les autorités peinent à restaurer la confiance et le contrôle, l’art devient un espace de résistance symbolique, révélant la résilience d’une population qui refuse de céder à la paralysie politique et économique.

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