C’est une petite révolution dans le monde de la conservation animale. Pour la première fois, des scientifiques britanniques ont mis au point un vaccin capable de protéger les jeunes éléphants d’Asie contre un virus souvent mortel, l’EEHV, une forme d’herpès qui peut tuer un éléphanteau en moins de 24 heures.
L’annonce émane d’une équipe réunissant le zoo de Chester, l’université du Surrey et l’Agence britannique de santé animale et végétale. Après plusieurs années de recherche, leurs travaux offrent enfin une lueur d’espoir pour une espèce au bord de l’extinction : selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), il ne reste plus que 40 000 éléphants d’Asie dans le monde.
Ce virus redoutable sévit depuis des années dans les parcs et réserves d’Inde, du Népal, du Myanmar et de Thaïlande. Il touche principalement les jeunes pachydermes, dont le système immunitaire n’est pas encore totalement formé. En quelques heures, il provoque de violentes hémorragies internes, un gonflement de la tête et une léthargie fatale.
Le professeur Falko Steinbach, immunologiste vétérinaire à l’université du Surrey et coauteur de l’étude publiée dans Nature Communications, explique : « L’objectif n’est pas d’empêcher l’infection, mais de s’assurer que les éléphants y survivent. Leur système immunitaire est ainsi préparé à réagir plus rapidement et plus efficacement. »
Contrairement à de nombreux vaccins classiques, celui-ci n’utilise pas de virus affaibli. Impossible, car le pathogène ne peut être cultivé en dehors du corps de l’éléphant. Les chercheurs ont donc opté pour une approche plus fine : en analysant le génome du virus responsable de la mort d’un éléphanteau du zoo de Chester, ils ont isolé deux fragments capables de stimuler la défense immunitaire. Ces éléments ont ensuite été intégrés à deux types de vaccins complémentaires, administrés par injection et renforcés par des rappels.
Pour la Dr Katie Edwards, responsable scientifique au zoo de Chester, ce vaccin marque une étape décisive. « Lorsque les symptômes apparaissent, il est souvent déjà trop tard. Nous espérons désormais prévenir ces drames avant qu’ils ne se produisent », souligne-t-elle.
D’abord destiné aux éléphants vivant dans les zoos et sanctuaires, le vaccin pourrait, à terme, être administré aux populations sauvages, notamment en Asie du Sud-Est. Un défi logistique colossal, mais porteur d’un immense espoir pour l’avenir de l’espèce.
Si ce vaccin confirme son efficacité sur le terrain, il pourrait bien devenir l’une des avancées les plus marquantes de la décennie pour la sauvegarde de l’éléphant d’Asie — ce géant fragile qui, depuis des millénaires, fascine autant qu’il inquiète par sa vulnérabilité face à l’homme et à la nature.