Face à la montée en puissance des hébergements touristiques non classés, en particulier les appartements meublés loués via des plateformes numériques comme RBNB, le Maroc amorce un virage réglementaire majeur. Avec l’entrée en vigueur de la loi 80.14, les autorités entendent désormais instaurer un système de classification élargi à tous les types d’hébergements, y compris les locations saisonnières qui échappaient jusqu’ici à tout contrôle formel.
Selon plusieurs sources concordantes, le ministère du Tourisme s’apprête à publier un décret d’application visant à offrir un cadre légal clair à des milliers d’appartements, maisons et riads opérant jusque-là dans une zone grise. Au-delà de la simple régularisation, cette initiative ambitionne de rétablir des conditions de concurrence loyales entre établissements classés et non classés, tout en garantissant une équité fiscale essentielle à la consolidation de l’économie nationale.
Longtemps considérés comme une alternative plus souple et moins coûteuse aux hôtels traditionnels, ces hébergements informels concurrencent aujourd’hui frontalement le secteur hôtelier, sans en partager les contraintes réglementaires ou fiscales. Un acteur du secteur touristique souligne que de nombreux propriétaires ont été freinés par la complexité des critères de classement. Les nouvelles dispositions leur offriront une période de grâce pouvant aller jusqu’à deux ans pour se mettre en conformité, ouvrant ainsi la voie à une intégration progressive et adaptée.
En 2024, le Maroc a enregistré officiellement 17,4 millions de touristes et 28 millions de nuitées. Mais les professionnels s’accordent à dire que les chiffres réels sont bien supérieurs, une grande partie de l’offre échappant aux radars officiels. En intégrant ces hébergements dans le système, l’État espère affiner ses données, mieux planifier ses politiques publiques et mieux cibler ses investissements.
Marrakech reste le symbole de cette économie parallèle : sur les quelque 80 000 lits non classés recensés à l’échelle nationale, près de 30 000 se concentreraient dans la ville ocre. Selon les projections, la régularisation de ces unités pourrait à elle seule faire bondir le nombre de nuitées de 10 % par an dès 2027, sans avoir besoin d’augmenter le flux touristique. Une avancée majeure vers un tourisme plus transparent, plus structuré et durablement plus juste.